La nouvelle Seat Ibiza pointe le bout de son nez. Best seller de la marque espagnole depuis son lancement, que vaut elle aujourd’hui? Alors que la concurrence n’a jamais été aussi forte dans ce créneau et que Seat ne s’est jamais aussi bien porté, Niko est parti à Barcelone, aux origines de la marque pour vous en dire plus.
Route de la côte Normande, fin des années 90. Une bande de jeunes cons vient de quitter la RN 13, et roule à vive allure dans le sens Arromanches-Grandcamp, dans une petite voiture grise. Derrière elle, une Peugeot 205 lui emboîte le pas, ainsi qu’une AX, moins puissante mais beaucoup plus légère. Il fait nuit, l’été est chaud, les filles pas vilaines, et les radars plus rares qu’aujourd’hui. Le point d’arrivée de cette spéciale, devant la plage, permet d’admirer le vainqueur et sa monture : une magnifique Seat Ibiza, portant fièrement sur ses flancs une inscription magique : « Systeme Porsche ». Oui Monsieur ! (on peut lire sur le sujet ce court article: Seat Ibiza SXI).
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Oui, bon, d’accord, la Seat Ibiza première génération sent bon les années 80 (suffit de regarder les épaulettes)
Ce souvenir de jeunesse me fait surtout penser que, depuis, l’ironie de l’histoire n’a pas manqué de prendre le dessus. Aujourd’hui Seat et Porsche ont suivi le même chemin et sont toutes les deux des marques du géant Allemand VW. L’année dernière Seat à fait 8,6 milliards de chiffre d’affaire et un bénéfice de 143 millions d’euros. Ce dernier chiffre peut sembler modeste mais c’est le meilleur résultat de toute l’histoire du constructeur Espagnol et surtout c’est un bénéfice, ce qui pour Seat est déjà un exploit. Les nombreux investissements commencent à porter leurs fruits et la marque est à l’aube du plus grand plan produit de son histoire.
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Le cabriolet ne sera jamais produit, faudra se contenter de versions fermées (en bas, avec un toit ouvrant, appelée « Del Sol »)
1984 : Je suis à peine en âge de porter des slips de couleur, Michael Jackson révolutionne l’histoire de la musique avec un ouragan intergalactique nommé Thriller, en France on inaugure le Zénith de Paris, au cinéma on chasse les fantômes dans Ghostbusters (lire aussi: l’ecto-1 de Gohstbusters) et l’aventure prend les traits d’un certain Indiana Jones. Le petit Mark Zuckerberg, dans son berceau, commence à réfléchir à la façon dont il va tous nous ficher, et chez Seat, on sort l’Ibiza ! L’enjeu est capital. L’Ibiza est la première voiture conçue en interne. Les précédentes Seat étaient des Fiat rebadgées et les plaies du divorce avec les Italiens sont encore béantes quand on présente cette citadine. (lire aussi: Seat Ronda, l’objet de la discorde). Même si l’état Espagnol a mis la main au porte monnaie pour sauver le seul constructeur national, les ingénieurs n’ont pas le droit à l’erreur.
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la SXI (en haut) sera le porte étandard d’une gamme produite en nombre
On s’adresse à une valeur sûre du dessin, Italdesign, l’entreprise de Giorgetto Giugiaro. Ca tombe bien car sur le bureau de ce dernier, se trouve une proposition refusée par Volkswagen pour donner une descendante à la première Golf. Le dessin est adapté à la plate forme de la Fiat 127, Karmann travaille sur l’industrialisation et sur l’adaptation du châssis. Les moteurs sont repris de blocs Fiat mais revus par Volkswagen et Porsche. La transmission est celle de la Ronda qui avait également été développée du côté de Stuttgart. L’Ibiza est née ! C’est un charmant mécano Européen.
1986 : VW veut produire des autos de sa marque et des Audi en Espagne, les usines Seat sont sous exploitées, l’accord est conclu. VW aidera Seat et en échange on produira des voitures du groupe dans les usines Espagnoles. Depuis, 4 générations se sont succédées pour un total de 5,4 millions d’unités produites (dont un concept Vaillante rigolo, lire aussi: Seat Ibiza Vaillante). C’est la nouvelle monture de ce best seller qui nous a conduit à Barcelone. Avant de commencer je vous conseille un petit Manu Chao pour la bande son avec une petite préférence pour la période Radio Bemba ou le Live à Bayonne.
La Seat Ibiza cuvée 2017 inaugure la nouvelle plate forme du groupe Volkswagen. Celle ci, baptisée poétiquement MQBAO servira aux futures Polo, Fabia, Audi A1 et à leurs dérivés. C’est une base évolutive dont on peut faire varier l’empattement selon les modèles. L’Ibiza nous a été présentée uniquement en motorisation essence. Une première bonne raison à cela est qu’au lancement les diesels seront absents et viendront intégrer la gamme par la suite. La deuxième bonne raison c’est que le mix énergétique ne cesse de pencher pour les motorisations essence. La troisième bonne raison c’est que le Diesel c’est caca et qu’on a les mains qui puent si on fait le plein avec ça. Comme chez tous les constructeurs en ce moment, c’est du bout des lèvres qu’on nous parle du gasoil. Le Diesel n’est pas encore devenu totalement tabou mais on s’en approche. On sent que dans le groupe, plus qu’ailleurs on nous parle du fioul comme d’un tonton qui aurait fait de la taule, des activités de Papy pendant la guerre ou du petit dernier à qui il manquerait une oreille. On peut en parler mais c’est mieux si on en parle pas. D’ailleurs on nous « branche » vite sur un autre sujet bien plus dans l’air (pur) du temps : l’électrique, avec la promesse d’un modèle à prise en 2019.
De l’extérieur, cette nouveauté marque un vrai bond en avant concernant le style. C’est dynamique, les flancs creusés donnent une belle impression de mouvement et les nervures sur le capot sont du plus bell effet. On s’éloigne du style VW pour s’approprier une vraie personnalité. Cette nouveauté donne envie de voir les prochains modèles et apportent une pâte Seat. Pour les amateurs de chiffres sachez qu’elle s’est élargie de 87 mm, la longueur et la hauteur diminuant respectivement de 2 et 1 mm. Les portes à faux étant réduits au minimum nous sommes en présence d’une voiture à l’allure presque sportive. L’Ibiza est campée sur la route. Sachez que l’Ibiza sera disponible uniquement en 5 portes. Pas de version 3 portes, ni de break et encore moins de Coupé, chez Seat on a compris que l’investissement ne serait pas à la hauteur des ventes. Vous laissant seul juge concernant le dessin extérieur, je voudrais m’attarder un instant sur l’intérieur de cette espagnole.
Dans l’industrie automobile, en ce qui concerne l’emplacement des désormais indispensables écrans multifonctions, il y a deux écoles. Soit à hauteur d’yeux, posés sur la partie supérieure de la planche de bord pour garantir visibilité et sécurité, soit sur la console centrale ce qui oblige le conducteur à quitter les pupilles de la route. Seat a choisi la seconde solution. J’attends le constructeur qui mettra l’écran dans la boîte à gants. Je précise qu’il n’y a pas non plus d’affichage tête haute. Heureusement, l’Ibiza possède un emplacement au centre des deux compteurs sur lequel on peut paramétrer un rappel des infos qui nous semblent les plus utiles, comme par exemple les indications GPS. Les compteurs justement venons y. Ils sont classiques mais on nous informe qu’ils seront remplacés sur les modèles 2018 par un cockpit digital. Vous avez envie de savoir pourquoi ils ne sont pas disponibles dès le lancement alors que la technologie est présente depuis un bout de temps sur les autres modèles du groupe? Nous aussi.
Ce qui m’a interpellé en pénétrant dans l’habitacle de l’espagnole c’est la tristesse absolue. Certes on peut opter pour un bandeau de couleur carrosserie destiné à égayer la planche de bord, mais non ça ne marche pas désolé. On sort du noir pour apporter une touche de couleur bienvenue mais où sont les DJ et les nanas en tenue légères? La promesse était dans le nom, quand on s’appelle Ibiza on doit sentir le sable chaud. Aussi chaleureux qu’un notaire de province portant du Tergal, l’intérieur de l’espagnole aurait mérité un peu plus de sensualité. Je ne prendrais qu’un exemple pour illustrer mon propos. Quand vous montez dans une Alfa Roméo vous savez que vous êtes dans une voiture Transalpine. Les courbes, les commandes, le dessin, tout vous renvoit à l’Italie. Posez n’importe qui à l’intérieur de la Seat en cachant le logo, personne ne saura vous dire qu’il est dans une voiture espagnole. Comme je suis un peu taquin j’ai posé la question en conférence de presse sur le manque de latinité de cet habitacle. On m’a répondu qu’il s’agissait d’un intérieur très bien fabriqué, avec de bons matériaux, une bonne ergonomie et des commandes bien rangées. Autant de mots qui je sais, chers lecteurs, sonnent au fond de vos oreilles comme une invitation au voyage. Comme si avoir un tableau de bord dont le réseau électrique fonctionne impliquait de le dessiner à la règle. Pour le reste cet habitacle est effectivement bien construit, avec des plastiques certes durs mais pas désagréables pour autant et largement au niveau de la concurrence.
La concurrence justement qui de plus en plus propose des systèmes connectés, et de ce côté là l’Ibiza n’est pas la dernière. L’espagnole est livrée avec la navigation intégrée, la reconnaissance vocale et une connectivité totale permise par les systèmes Apple Car Play et Android Auto. Ce qui signifie en gros que même si comme l’équipe BR vous disposez de vieux clous, vous pourrez les utiliser en conduisant.
La conduite justement, c’est ce qui m’intéresse réellement dans l’essai d’une nouveauté. De ce côté là je n’ai pas été déçu. Après avoir jeté mon dévolu sur la version essence 115 chevaux sur le parking, je m’élance sur les routes entourant Barcelone. Ces routes chez BR on commence à les connaître et bien aidé par le GPS assez réactif, je me lance à l’assaut de ces petits virages serrés comme on les aime.
Première observation, il y a de l’espace à bord et en cela cette nouvelle plate-forme marque un bond en avant. Au volant, d’ailleurs on pourrait se croire dans une compacte. Après quelques dizaines de kilomètres à allure “normale” (pas plus de 30 au dessus des limitations) mon copilote du jour, m’invite à le laisser au bord de la route. Non pas pour vomir mais pour faire quelques prises de vue en dynamique. Je parcours donc cette spéciale dans les deux sens à plusieurs reprises. Cette expérience m’amène à un constat, en usage normal vous ne viendrez pas à bout de la tenue de route de l’Ibiza. C’est équilibré, prévenant, sécurisant. Si vraiment vous poussez le bouchon trop loin, un léger survirage viendra vous rappeler à l’ordre mais franchement faut le chercher. Ce n’est pas une sportive et il est clair que la clientèle visée n’en arrivera pas à de telles extrémités. Concernant ce moteur essence, il est réactif et la boîte correctement étagée. J’insiste sur ce point car Seat ne tombe pas dans le travers à la mode qui consiste à asphyxier le moteur par l’adoption d’une boîte hyper longue destinée à économiser le taux de CO2 mais qui entraîne systématiquement l’effet inverse tant on doit rétrograder. Le niveau sonore est très acceptable et le système audio Beats 7hp est dans dans la bonne moyenne même si comme souvent on privilégie les basses au détriment du reste.
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Azur, nos bêtes sont bondées d’un cri, je m’éveille songeant aux fruits noirs de l’amibe dans sa cupule verruqueuse et tronquée
Au final cette Ibérique est agréable à vivre. Il y a de la place, même à l’arrière et même dans le coffre, ce qui pourra convenir à un couple avec un gamin. Elle est jolie et dynamique, ce qui correspondra à la clientèle visée c’est à dire les jeunes actifs plein d’avenir, et elle est suffisamment facile pour convenir à la clientèle qui achète vraiment des voitures neuves, c’est à dire les gens d’un certain âge. En terme de tarifs elle sera placée dans la moyenne des Clio, et 208 en France avec plus de modernité. Est elle Boîtier Rouge? Elle a une histoire de toute évidence. Elle le serait surement plus avec un autocollant “Système Porsche” évidemment mais ça peut toujours s’arranger.