Si si, on y croit. Cette fois-ci c’est l’été pour de bon et ça cogne. Alors entre un soleil de plomb et des nuits écrasantes à rester planté en slip devant la porte ouverte du frigo, mieux vaut pas sortir la bécane, laisser le cab’ au garage et rester bien à l’ombre si on veut pas risquer l’irréparable bronzage VRP-coude-à-la-fenêtre. Non, sérieux, vous voulez vraiment rouler ? OK. Alors allez-y à la fraiche, aux premières lueurs de l’aube, ou tard le soir, quand on n’entend plus rien d’autre que les grillons. Et entre temps, fermez les volets, baissez les stores, allumez le ventilo, sortez vous un esquimau et plantez une cassette dans le magnéto ! Vous savez pas quoi regarder ? Pas de problème, vous êtes au vidéo-club de « Boîtier Rouge » et on a justement une petite sélection de films « speshial seummeur », des films aussi chauds qu’une moleskine de l’été 76, qui sentent bon l’automotostérone et la gomme brulée, à savourer dans la pénombre, une boisson fraîche à portée de main. Vous êtes prêt/e ? Je vous propose huit films, comme les huit salopards, les huit samouraïs ou encore les huit cylindres en V de la Mustang de Steve McQueen. Huit films pour juillet-août, comme ça vous avez de quoi passer l’été au rythme d’un chef d’œuvre du septième art par semaine. Allez, on y va ? Alors on pousse sur la VHS et on appuie sur Play.
Un été d’enfer
France, 1984, Michaël Schok
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Thierry Lhermitte et sa Yamaha XS 1100 Midnight Spécial, le chevalier et son fidèle destrier volent au secours de la belle Véronique Jannot éplorée, dont la non moins belle sœur, Corinne Charbit, a disparu, comme ça, pouf, sans laisser de traces.
À voir pour la prestation très honnête de Thierry-l’ex-bronzé chevauchant sa grosse Yam’, chargé comme une mule (lui, pas la moto), au petit matin sur la plage. À voir aussi pour la Porsche 911 du méchant super mal sapé, pour la R18 break du flic, la vieille américaine de l’indic et la Seat Ronda SX de Véronique. À voir enfin pour une histoire pas mauvaise, équilibrée entre investigation, action et scènes de bisous-bisous, le tout sur une bande originale de François Valéry !
« Un été d’enfer » vous plonge dans les 80s direct, c’est pas le film du siècle, loin de là, mais c’est parfait pour passer un bon moment au frais.
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Le Convoi
Convoy, USA, 1978, Sam Peckinpah
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Sous le soleil de plomb de l’Arizona et du Nouveau-Mexique, le Duck, son gros camion et ses potes les routiers se soulèvent contre l’autorité.
À voir pour la sublime Ali MacGraw au volant de sa Jaguar Type E (et son Nikon F2). À voir bien sûr pour l’impressionnant convoi de bahuts américains tracer sa route au mépris des forces de l’ordre. À voir enfin pour un cinémascope aussi impeccable que grandiose.
Le Convoi est un road movie camionesque, caniculaire, engagé et contestataire, une épine de gauche dans le pied droit de l’Amérique d’alors, un film qui pue le diesel sous les aisselles. Peckinpah signe un authentique film culte, une œuvre paradoxalement aussi mécanique que profondément humaine.
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Born Losers
USA, 1968, Tom Laughlin – sous le pseudonyme de TC Franck
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La Californie, son soleil, ses plages, ses jolies jeunes filles qui font de la moto en bikini, ses gangs de motards et son justicier mi-américain / mi-indien / mi-vétéran du Vietnam…
À voir pour Tom Laughlin, qui introduit ici son personnage fétiche, Billy Jack et en profite pour poser les bases d’un combat qu’il mènera jusqu’à la fin de ses jours. À voir aussi pour la belle Elizabeth James, sa jolie Honda CL 160, son bikini blanc et ses lunettes prêtées par Michel Polnareff. À voir enfin pour la bande de gros méchants Hells Angels en choppers Harley, emmenés par un Jeremy Slate enragé et lui aussi lunetté par Polnareff.
Born Losers est un film de bikers en forme western moderne et urbain, un genre très en vogue aux US entre la fin des 60s et le début des 70s. La plupart sont des séries B, voir Z, cheap et fun à regarder, mais soyons honnêtes, qui ne cassent pas trois briques à un connard. Ceci dit, à mon humble avis, Born Losers vaut le détour. Plutôt bien fichu, on peut le regarder au premier comme au second degré et dans le deuxième cas, y entrevoir le potentiel talent d’un Tom Laughlin qui, à l’instar d’un certain Dennis Hopper, n’hésite pas à aller remuer la merde.
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Échappement libre
France / Italie / Espagne, 1964, Jean Becker
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Bébel en cavale au volant d’une Triumph TR4, 300 kg d’or et la charmante Jean Seberg dans le siège passager. Échappement libre est un bon petit road movie entre polar et comédie, qui vous emmène à toute vitesse sous le soleil du Liban, dans la canicule grecque ou encore dans la fraicheur d’un bel appartement romain.
À voir pour une petite TR4 à la sonorité envoutante, menée tambour battant pour un Jean-Paul Belmondo déjà un brin cabot. À voir bien sûr pour Jean Seberg, dont la beauté pure et la froideur du jeu contraste délicatement avec les frasques de son partenaire. À voir enfin pour la somptuosité des paysages naturels et des villes traversées, le tout transcendé par un noir et blanc qui va à l’essentiel sans s’encombrer d’aucun artifice.
C’est en noir et blanc, le son est nasillard, il y a Belmondo et Seberg, forcément ça fait très nouvelle vague, très À bout de souffle, mais la comparaison s’arrête là. Échappement libre n’est pas aussi fin que son faux frère signé Godard, c’est un film léger et divertissant qui fait la part belle à l’action et à l’aventure ; et franchement, c’est très bien comme ça !
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Hell Ride
USA, 2008, Larry Bishop – qui écrit, réalise, produit et tient le rôle principal…
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Johnny ‘Pistolero’ est le pres’ d’un gang de bikers, les Victors. Chez cette bande de gentlemen riders poilus et tatoués, on aime faire la fiesta, courtiser la demoiselle et accessoirement traficoter dans les armes à feu. Bref, Pistolero c’est le genre de mec qu’il faut pas faire chier ; et justement, ces salopards de 666 (le gang rival) l’ont bien gonflé en assassinant Cherokee, sa compagne bien aimée. On a démarré des guerres pour moins que ça… ‘va pas tarder à faire encore plus chaud que d’habitude dans le désert de Californie du sud.
À voir pour son impressionnant casting de brutes : Michael Madsen (Reservoir Dogs, Kill Bill), Eric Balfour (Massacre à la tronçonneuse, Les Cavaliers de l’Apocalypse), David Carradine (Death Race 2000, Kill Bill), Vinnie Jones (Snatch, Midnight Meat Train) et Monsieur Dennis Easy Rider Hopper en personne y fait même une apparition – ce sera d’ailleurs son dernier rôle avant de nous quitter. À voir particulièrement pour son côté macho totalement assumé, mais à ne surtout pas prendre au premier degré. À voir enfin pour sa jonction avec l’univers de Tarantino, qui œuvre ici en tant que producteur délégué.
Hell Ride c’est de la testostérone pulsée au bi-cylindre de Milwaukee, le film tout entier est un gros bordel, ça tire dans tous les sens (au propre et au… pas propre), ça cogne, ça pue et les bécanes sont couvertes de la même poussière que celle des westerns du bon vieux temps. Plus politiquement incorrect, tu meurs. Un régal.
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Maximum Overdrive
USA, 1986, écrit et réalisé par Stephen King
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Suite au passage d’une comète à proximité de la Terre, toutes les machines deviennent autonomes… Et agressives. C’est ainsi que dans la canicule estivale de la Caroline du Nord, une paisible station service est assiégée par une bande de camions sauvages.
À voir pour le sublime White Western Star 4800 à la tête de bouffon vert, la véritable star du film c’est lui ! À voir aussi pour la très fun scène d’introduction allant du distributeur de billet atteint de Tourette à la tondeuse à gazon tueuse en passant par le canon à canettes, le tout nappé de Who Made Who d’AC/DC. À voir enfin pour son indéniable côté nanar, clairement c’est ce que j’appelle un très bon mauvais film.
Maximum Overdrive est le jumeau maléfique de Christine. Même père, même thème (le véhicule prédateur) mais vraiment pas la même envergure. On pense aussi bien sûr à Duel, de Spielberg mais on peut pas vraiment comparer, l’un est chef d’œuvre minimaliste et précis, tandis que l’autre est plus pataud et surtout beaucoup moins esthétique. Mais peu importe, l’essentiel est quand même là, quelque part entre Fort Alamo et Assaut sur le Central 13, Stephen King parvient malgré tout à tenir le rythme et livre un B-movie plutôt fun et très fréquentable.
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Papa
France, 2005, Maurice Barthélemy
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Alain Chabat et son fiston tracent la route en Volvo 240 Le Break. Quand le talent du meilleur acteur français rencontre la sensibilité à fleur de peau d’un ex-Robin des Bois, ça donne un road movie où on se marre autant qu’on pleure.
À voir pour la parfaite alchimie qu’il y a entre Alain Chabat et le petit Martin Combes. À voir aussi évidemment pour avaler les kilomètres en leur compagnie à bord de la plus belle des briques de la route. À voir enfin pour se laisser porter par une histoire bien construite et surtout très touchante.
Papa, c’est un de ces films hors de l’espace et du temps, une aire de repos sur l’autoroute des blockbusters lourdingues de l’été, un moment de justesse et de légèreté qui mélange à la perfection intrigue intrigante, exercice des zygomatique et boule dans la gorge. Papa est un beau film, tout simplement.
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Little Miss Sunshine
USA, 2006, Jonathan Dayton et Valerie Faris
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Un coach, une mère de famille, un ado, un professeur homosexuel, un grand-père héroïnomane et une petite fille de sept ans et demi sont dans un Combi Volkswagen.
À voir pour les caprices du Combi jaune. À voir aussi pour Greg Kinnear faisant de la mobylette. À voir enfin pour la scène du policier qui arrête le Combi pour un contrôle.
Little Miss Sunshine est un road movie loufoque et familial qui, à l’instar de Papa, se paye le luxe d’être aussi drôle que touchant. Cette histoire de petite fille qui veut à tout prix participer à un concours de beauté est construite autour d’une galerie de personnages singuliers, tous un peu dingues et pourtant terriblement réalistes. L’idée de génie du film consiste à réunir tout ce petit monde à bord d’un iconique Combi VW jaune canari pour un voyage initiatique dont aucun ne reviendra indemne, ou dont chacun reviendra guéri, au choix.
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Allez, pour finir, une petite liste des films pré-sélectionnés qui n’ont finalement pas été retenus :
Duel (USA, 1971, Steven Spielberg)
Easy Rider (USA, 1969, Dennis Hopper)
Le Lauréat (USA, 1967, Mike Nichols)
Les Spécialistes (France, 1985, Patrice Leconte)
Les Valseuses (France, 1974, Bertrand Blier)
L’affaire Thomas Crown (USA, 1968, Norman Jewison)
À bout de souffle made in USA (USA, 1983, Jim McBride)
Time Rider (USA, 1982, William Dear)
Mad Max (Australie, 1979, George Miller)
Cours après moi shérif (USA, 1977, Hal Needham)
Cherry 2000 (USA, 1987, Steve De Jarnatt)
Kalifornia (USA, 1993, Dominic Senna)
Flic ou voyou (France, 1979, Georges Lautner)
Romanzo criminale (Italie, 2005, Michele Placido)
American Grafitti (USA, 1973, George Lucas)
Cars (USA, 2006, John Lasseter)
Texte: Thierry Vincent
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